Il s’agit d’une série photographique dans laquelle ORLAN reprend et intègre des éléments de l’histoire de Peau d’âne dans des autoportraits.
Peau d’âne est une princesse demandée en mariage par son père car celui-ci a promis à la reine, sa mère, de ne prendre pour épouse qu’une femme plus belle qu’elle, et Peau d’âne est la seule femme de cet acabit. Sa fille échappe au désir du père en s’habillant de la peau de l’âne.
Pour échapper au territoire du père, il faut changer de peau. ORLAN décide alors d’en expérimenter de nouvelles, multiples, dans une veine humoristique et distanciée. ORLAN est pour les identités mouvantes, mutantes, nomades, et non pas pour les identités fixes.
Dans cette série, ORLAN, pour chaque photo a un habit différent ainsi qu’un chapeau qui va du Képi à la Mitre en passant par la casquette et la tête de l’âne.
En 1989 et 1992, ORLAN a reçu deux bourses du FIACRE et des Fonds d’Innovation Artistique et Culturel en Rhône-Alpes, pour partir en résidence à Chennai (ville à l’époque appelée Madras), en Inde. À l’occasion de son second voyage d’une durée de trois mois et demi, elle était accompagnée par Stephan Oriach, un réalisateur avec qui ORLAN avait collaboré dans le passé.
Son voyage en Inde s’inscrivait dans “le plan du film”, une série d’œuvres imaginée à partir de la lecture d’une citation de Jean-Luc Godard : « La seule grandeur de Montparnasse 19 de Jacques Becker est d’être non seulement un film à l’envers, mais en quelque sorte l’envers du cinéma. » Le concept était de prendre à la lettre Godard, de créer un film à l’envers, en commençant par l’affiche et la promotion avec la bande-annonce, letrilles, une bande son et une émission de télévision pour le lancement du long-métrage. ORLAN a fait appel à une agence de publicité, Publidécor, spécialisée dans les affiches de cinéma peintes des années 1950, avec qui ORLAN crée quatorze affiches peintes à partir de photos de l’artiste et de photos d’œuvres recyclées. Son intention à travers ces affiches peintes à la main, à l’acrylique sur des toiles de 3 m x 2 m, était de raconter sa vie dans l’art. ORLAN a fabriqué ces affiches en mettant en scène le nom de ses ami.e.s du milieu de l’art du moment, et un nom ou deux noms de vedettes du cinéma faisant croire à l’existence du film. Elle a également monté une fausse conférence de presse avec la complicité du réalisateur Bigas Luna et du commissaire d’exposition Lorand Hegyi à l’occasion d’une biennale de Valencia. Elle a convié de nombreux journalistes afin de leur parler d’un film qu’elle aurait tourné et qui n’existait pas réellement.
Peinture Problématique Géométrique, Paris, France 1971-1974
Comme beaucoup d’artistes, ORLAN a commencé sa carrière par la peinture. Elle ne voulait pas créer de choses mièvres et ne voulait pas utiliser de pinceau, un outil si commun, si traditionnel !
ORLAN peint avec un pistolet d’un garagiste à côté de chez elle. Elle l’avait convaincu de lui prêter, en dehors des heures d’ouverture, un espace pour travailler, hors poussière.
Elle a d’abord fait des recherches, des esquisses, des dessins, puis elle a composé des œuvres abstraites qu’elle a peintes au pistolet sur laminé blanc avec des systèmes de réserves.
La peinture s’infiltrait sous les morceaux de scotch, mais ORLAN a persévéré jusqu’à ce que le rendu soit parfait, pour créer des œuvres extrêmement brillantes, laquées comme un miroir dans lequel on peut se mirer. C’est de la peinture abstraite géométrique, comme industrielle, et il n’y a pas la moindre trace de corps, mais c’est tout de même le regardeur qui fait l’œuvre ! Lorsqu’il passe devant et observe la peinture, il peut en même temps se voir dedans. Le corps est là, les spectateurs sont dans l’œuvre d’art ! L’œuvre d’art est leur miroir.